Nuchem Klajnerman

né le 25 octobre 1906 à Jasien (Pologne)

 

Je vais essayer de vous parler de mon père, que j'ai peu connu. Je suis né en 1936.

Le peu que j'en sais, je l'ai appris par ma mère et par ses amis, et j'ai un peu reconstitué sa vie par la lecture de ses papiers.

Mon père, tailleur d'habits, n'a pas fait son service militaire en Pologne. Il a connu sa femme dans les années 1925-1926 et s'est marié en janvier 1931. Il est parti en France tout de suite après son mariage. Ma mère l'a rejoint en janvier 1932. Ils ont eu une vie heureuse et ont eu deux fils. Ma grand-mère maternelle est venue nous rejoindre à Nancy (Meurthe-et-Moselle) en décembre 1938, pour aider sa fille à la naissance de mon frère, en janvier 1939.

Tout a basculé pour nous à la déclaration de la guerre. Mon père s'est engagé volontaire. Il a été fait prisonnier en juin 1940 à Toul (Meurthe-et-Moselle). En avril 1941, il s'est évadé de Nancy et nous a rejoints à Toulouse où nous étions réfugiés. De Toulouse, nous sommes partis pour Bruguières (Haute-Garonne). Là, mon père fut arrêté par un gendarme français. Il a été travailleur pour le S.T.O. à partir du 30 septembre 1943.

Interné au camp de Caroute l'Avéro (Noé), il fut transféré à Drancy le 23 avril 1944, d'où il fut déporté le 15 mai 1944 dans le convoi n° 73.

Pour le peu que j'en sache, mes parents ont eu, jusqu'à la guerre, une vie heureuse comme tous ceux qui gagnaient relativement bien leur vie, faite de petits riens heureux ou malheureux, mais heureux le plus souvent.

C'est très peu, pour conter la vie d'un homme, mais c'est tout ce qui me reste de mon père.

Jacques Klajnerman